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Textes philosophiquesDiderot inspiration et imagination exacerbeQui est-ce qui mle sa voix au torrent qui tombe de la montagne ? Qui est-ce qui sent le sublime d'un lieu dsert ? Qui est-ce qui s'coute dans le silence de la solitude ? C'est lui. Notre pote habite sur les bords d'un lac. Il promne sa vue sur les eaux, et son gnie s'tend. C'est l qu'il est saisi de cet esprit, tantt tranquille et tantt violent, qui soulve son me ou qui l'apaise son gr... [...] L'enthousiasme nat d'un objet de la nature. Si l'esprit l'a vu sous des aspects frappants et divers, il en est occup, agit, tourment. L'imagination s'chauffe. La passion s'meut. On est successivement tonn, attendri, indign, courrouc. Sans l'enthousiasme, ou l'ide vritable ne se prsente pas ou si par hasard on la rencontre, on ne peut la poursuivre. . . Le pote sent le moment de l'enthousiasme. C'est aprs qu'il a mdit. Il s'annonce en lui par un frmissement qui part de sa poitrine, et qui passe d'une manire dlicieuse et rapide jusqu'aux extrmits de son corps. Bientt ce n'est plus un frmissement. C'est une chaleur forte et permanente qui l'embrase, qui le fait haleter, qui le consume, qui le tue mais qui donne l'me, la vie tout ce qu'il touche. Si cette chaleur s'accroissait encore, les spectres se multiplieraient devant lui. Sa passion s'lverait presque au degr de la fureur. Il ne connatrait de soulagement qu' verser au-dehors un torrent d'ides qui se pressent, se heurtent, et se chassent. Dorval et moi. Second entretien sur le Fils naturel (1757)
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