Textes philosophiquesSimone Weil l'attention et l'intelligence
La volont, celle qui au besoin fait serrer les dents et supporter la
souffrance, est l'arme principale de l'apprenti dans le travail manuel. Mais
contrairement ce que l'on croit d'ordinaire, elle n'a presque aucune place
dans l'tude. L'intelligence ne peut
tre mene que par le dsir. Pour qu'il y ait dsir, il faut qu'il y ait
plaisir et joie. L'intelligence ne grandit et ne porte de fruits que dans la
joie. La joie d'apprendre est aussi indispensable aux tudes que la
respiration aux coureurs. L o elle est absente, il n'y a pas d'tudiants,
mais de pauvres caricatures d'apprentis qui, au bout de leur apprentissage,
n'auront mme pas de mtier. C'est ce rle du dsir dans l'tude qui permet
d'en faire une prparation la vie spirituelle. (...) Les malheureux n'ont pas besoin d'autre chose en ce monde que d'tres capables de faire attention eux. La capacit de faire attention un malheureux est chose trs rare, trs difficile; c'est presque un miracle, c'est un miracle. Presque tous ceux qui croient avoir cette capacit ne l'ont pas. La chaleur, l'lan du coeur ne suffisent pas. (...) Ce regard est d'abord un regard attentif, o l'me se vide de tout contenu propre pour recevoir en elle-mme l'tre qu'elle regarde tel qu'il est, dans toute sa vrit. Seul en est capable celui qui est capable d'attention. Attente de Dieu, Paris, Livre de poche, 1963, p. 85 97. Indications de lecture : |